Types de description

Le carcinome épidermoïde se présente le plus souvent sous forme d’une érosion chronique, croûteuse, ou comme une
ulcération à bords irréguliers, infiltrante, d’évolution lente
(figure 5). L’aspect de tumeur végétante ou bourgeonnante
est plus rare. Un signe important est l’induration de la lésion
qui est perceptible en périphérie, plus ou moins étendue en
profondeur, qui déborde toujours largement les limites visibles de la lésion. En évoluant, la tumeur prend une forme ulcérovégétante.
L’extension du côté buccal peut atteindre le sillon gingivolabial, la gencive et l’os mandibulaire ou en dehors la commissure labiale et la joue avec dans ce dernier
cas un pronostic beaucoup plus sévère. Des localisations labiales multiples sont possibles. Des carcinomes épidermoïdes peuvent être présents dans d’autres localisations, VADS ou cutanées.
Les métastases ganglionnaires sont habituellement tardives ; la fréquence des métastases lymphatiques primaires varie de 2 à 10 % lors de la première consultation [8] ; elles sont sousmentales, sous-mandibulaires et, dans les cas avancés, préauriculaires et jugulocarotidiennes. Les carcinomes très bien différenciés métastasent dans moins de 10 % des cas alors que les carcinomes peu différenciés métastasent près d’1 fois sur 2.
Les carcinomes labiaux supérieurs croissent plus vite et métastasent plus rapidement que les carcinomes labiaux inférieurs, probablement parce que le drainage lymphatique labial supérieur est plus riche. Métastases mandibulaires et métastases multiples entraînant des paralysies de nerfs crâniens ont aussi été rapportées.
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Aspects cliniques

La localisation typique du carcinome épidermoïde labial est le
tiers moyen de la lèvre inférieure. C’est également la localisation privilégiée chez la femme même s’il existe un plus grand pourcentage de localisations labiales supérieures que chez l’homme.
Cliniquement, il apparaît d’emblée, ou se développe sur une
lésion précancéreuse.
Lésions précancéreuses
La leucoplasie est la plus fréquente dans notre expérience. Elle est le plus souvent d’origine tabagique (leucoplasie en pastille de la lèvre inférieure des fumeurs de cigarette avec parfois une lésion similaire en « décalque » au niveau labial supérieur) (figure 3). Il s’agit de placards plissés blanchâtres plus ou moins épais et étendus mais superficiels. L’aspect est soit homogène (hyper-, ortho-, et parakératosique avec un infiltrat inflammatoire chronique), soit nodulaire inhomogène (speckled leucoplakia des anglosaxons) où des dysplasies épithéliales sont souvent rencontrées [7]. Toute fissuration, érosion ou végétation apparaissant sur une leucoplasie labiale fait craindre une transformation maligne.
Le carcinome épidermoïde labial peut aussi se développer à partir d’une chéilite actinique [6]. C’est une hyperkératinisation réactionnelle apparaissant sur des lésions initialement érythémateuses et squameuses à surface irrégulière non indurée. Des croûtes se forment, et leur arrachement provoque de petits saignements (figure 4). Des surinfections sont possibles. Les lésions de chéilite actinique doivent être surveillées régulièrement (au moins 1 fois par an). Il est difficile d’y apprécier cliniquement la transformation maligne et un contrôle histologique est souvent indispensable. En présence de dysplasies, l’exérèse est la règle, souvent en recourant à une vermillonectomie. Il s’agit de l’ablation de l’ensemble de la lèvre rouge


Figure 4
Chéilite actinique
Figure 5
Carcinome épidermoïde labial inférieur


pour examen histologique de la totalité de la pièce. La réparation se fait par glissement de la muqueuse de la face interne de la lèvre inférieure. Il est à noter que la chéilite actinique peut être associée à d’autres kératoses actiniques des téguments exposés, particulièrement la face.
Chéilite actinique et chéilite tabagique peuvent s’associer et augmenter le risque de carcinome.
Enfin, le carcinome épidermoïde labial peut se développer sur d’autres lésions précancéreuses comme :
- l’e´ rythroplasie de Queyrat (rarement labiale pure) ;
- les le´ sions liche´ niennes chroniques ;- les le´ sions de lupus chronique ;- une che´ ilite glandulaire chronique, les cicatrices de bruˆ  lures ;- les radiodermites ;- les ulce´ rations chroniques.
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Facteurs étiologiques

L’exposition chronique au soleil (UV) constitue un risque admis de carcinome labial prédominant chez les personnes à peau claire ayant vécu au grand air, exposées au soleil et
aux intempéries (paysans, marins) ou vivant dans des latitudes très ensoleillées (Australie, Texas. . .). Le rôle carcinogène des UV B est démontré et apparaît prépondérant
devant les UV A et C. Le risque augmente avec la durée de l’exposition et l’âge, avec un effet seuil. C’est souvent sur des lésions de chéilite actinique que le carcinome épidermoïde
peut se développer. Son incidence n’est toutefois pas toujours corrélée à l’exposition au soleil. Comme on l’a vu, d’autres facteurs exogènes interviennent et ont une action synergique,
en particulier le tabagisme. Le tabac qui peut être consommé de diverses manières (cigarette, pipe, chique etc. . .) peut être responsable de kératoses ou leucoplasies  où les dysplasies épithéliales sont fréquentes, faisant le lit du carcinome épidermoïde labial.
transplantés rénaux par exemple, il est prouvé que le risque est majoré en fonction du phototype (clair), d’une expositionDes carcinomes labiaux ont par ailleurs été observés chez les greffés d’organes (reins, coeur, foie) sous traitement immunosuppresseur dans des délais variant de 2 à 4 ans [6]. Chez les solaire élevée et de la durée de l’immunosuppression induite.
Le rôle cocarcinogène du HPV (Human Papilloma Virus), fréquemment trouvé dans les lésions de ces patients, demeure controversé. Il l’est moins dans le carcinome verruqueux qui peut occasionnellement se localiser aux lèvres avec une évolution lente vers la transformation maligne.
D’autres affections telles les lésions chroniques (radiodermites, brûlures) peuvent faire le lit du cancer labial. Il faut également citer la maladie de Bowen, l’érythroplasie de Queyrat et certaines génodermatoses tel le xeroderma pigmentosum ou l’albinisme.
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Aspects épidémiologiques

L’incidence exacte des carcinomes de la lèvre est difficile à évaluer car ils font l’objet d’une approche épidémiologique globale avec les cancers de la cavité buccale, du pharynx et du larynx (voies aérodigestives supérieures [VADS]) et les cancers de l’oesophage. Certaines caractéristiques sont en effet communes, parmi lesquelles le fait qu’ils soient souvent liés au tabagisme et à la consommation excessive d’alcool. Les derniers indicateurs et données en France [1] figurent dans le tableau I.
Les 24 500 nouveaux cas de cancers des VADS et de l’oesophage observés correspondent pour 63 % à la sphère « lèvres, cavité buccale, pharynx » (pour 17 % au larynx et pour 20 % à l’oesophage). Selon les enquêtes, la distribution précise par sous-localisation varie, elle n’est pas toujours disponible en France. En 1995, sur un total de 21 597 cancers des VADS (14 926 chez l’homme et 6 671 chez la femme), 410 localisations labiales (code 140 dans la classification ICD-9, et C00 dans l’ICD-10) ont été enregistrées (375 hommes et 35 femmes) ayant entraîné 104 décès (92 hommes et 12 femmes) [2].
Dans les localisations VADS, le cancer des lèvres est en 7e position chez l’homme et en 9e position chez la femme par ordre de fréquence. Il représente 6,6 % des cancers buccaux en France (2 % seulement dans notre série à l’hôpital de la Salpêtrière) [3].
Ces chiffres sont nettement inférieurs à ceux rapportés de manière plus générale chez les caucasiens (race blanche), où le cancer labial représente 25 à 30 % de tous les cancers buccaux [4,5]. Cette variation est probablement due à une
implication différente des principaux facteurs de risque : radiations ultraviolettes (UV) et tabac.
Le carcinome épidermoïde labial est un cancer de l’homme
d’âge mûr. Le sex-ratio est de 10 à 20 :1. La femme est affectée dans 2 % à 2,8 % des cas ; 90% des patients ont plus de 45 ans et 50 % ont 65 ans et plus [4]. Le carcinome de la lèvre rouge est beaucoup plus rare chez les ethnies à peau foncée dont les individus à peau jaune.
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Points essentiels

Le carcinome épidermoïde est la tumeur maligne la plus fréquente des lèvres.
Il survient surtout chez les hommes.
Les causes essentielles sont l’exposition solaire, l’usage du tabac, des irritations chroniques.
La leucoplasie est la plus fréquente des lésions précancéreuses.
L’aspect clinique du carcinome épidermoïde peut être une érosion croûteuse ou une ulcération.
Le traitement habituel est la chirurgie d’exérèse avec plastie de reconstruction.

Rappels anatomiques
Les lèvres présentent 3 zones : un versant cutané pur, le vermillon ou lèvre rouge (zone de Klein) entre la zone de contact des 2 lèvres et la peau, un versant muqueux pur qui se réfléchit sur la gencive en formant le vestibule buccal (figure 1).
La structure des lèvres comporte de dehors en dedans : la peau, épaisse et riche en follicules pileux et glandes sébacées, le tissu cellulaire sous-cutané, absent dans la région médiane et commissurale, le squelette musculaire ; une couche de glandes muqueuses salivaires labiales, et la muqueuse, très adhérente à la couche glandulaire (figure 2).




Figure 1
Anatomie des lèvres
 Figure 2
Coupe sagittale de la lèvre inférieure



La vascularisation et le réseau lymphatique sont très importants.
La sensibilité est assurée par des branches du trijumeau
(V), nerf sous-orbitaire pour la lèvre supérieure, nerf mentonnier
pour la lèvre inférieure, et la motricité est assurée par des
branches du facial (VII).




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Carcinoma of the lips

Epidermoid carcinoma, that is, squamous cell carcinoma of the skin, is the most common malignant tumor of the lips.
It occurs especially in men.
Its primary causes are sun exposure, smoking, and chronic irritation.
Leukoplakia is the most frequent precancerous lesion.
Epidermoid carcinoma may appear clinically as a scaly erosion or an ulceration.
Standard treatment is surgical excision with reconstruction.
Les lèvres sont constituées de toutes les parties molles qui forment la paroi antérieure de la cavité buccale. De nombreuses tumeurs malignes peuvent occasionnellement les affecter. La
plus fréquente (plus de 90 % des cas), est le carcinome épidermoïde, ou épithélioma spinocellulaire, dont la localisation est typiquement labiale inférieure (plus de 95 % des cas), rarement labiale supérieure. La précession d’une lésion épithéliale précancéreuse est très fréquente. D’autres carcinomes sont rencontrés, en particulier salivaires naissant des glandes
salivaires accessoires sous-muqueuses et basocellulaires, plutôt rares dans cette localisation.
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