Points essentiels

Le carcinome épidermoïde est la tumeur maligne la plus fréquente des lèvres.
Il survient surtout chez les hommes.
Les causes essentielles sont l’exposition solaire, l’usage du tabac, des irritations chroniques.
La leucoplasie est la plus fréquente des lésions précancéreuses.
L’aspect clinique du carcinome épidermoïde peut être une érosion croûteuse ou une ulcération.
Le traitement habituel est la chirurgie d’exérèse avec plastie de reconstruction.

Rappels anatomiques
Les lèvres présentent 3 zones : un versant cutané pur, le vermillon ou lèvre rouge (zone de Klein) entre la zone de contact des 2 lèvres et la peau, un versant muqueux pur qui se réfléchit sur la gencive en formant le vestibule buccal (figure 1).
La structure des lèvres comporte de dehors en dedans : la peau, épaisse et riche en follicules pileux et glandes sébacées, le tissu cellulaire sous-cutané, absent dans la région médiane et commissurale, le squelette musculaire ; une couche de glandes muqueuses salivaires labiales, et la muqueuse, très adhérente à la couche glandulaire (figure 2).




Figure 1
Anatomie des lèvres
 Figure 2
Coupe sagittale de la lèvre inférieure



La vascularisation et le réseau lymphatique sont très importants.
La sensibilité est assurée par des branches du trijumeau
(V), nerf sous-orbitaire pour la lèvre supérieure, nerf mentonnier
pour la lèvre inférieure, et la motricité est assurée par des
branches du facial (VII).




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Carcinoma of the lips

Epidermoid carcinoma, that is, squamous cell carcinoma of the skin, is the most common malignant tumor of the lips.
It occurs especially in men.
Its primary causes are sun exposure, smoking, and chronic irritation.
Leukoplakia is the most frequent precancerous lesion.
Epidermoid carcinoma may appear clinically as a scaly erosion or an ulceration.
Standard treatment is surgical excision with reconstruction.
Les lèvres sont constituées de toutes les parties molles qui forment la paroi antérieure de la cavité buccale. De nombreuses tumeurs malignes peuvent occasionnellement les affecter. La
plus fréquente (plus de 90 % des cas), est le carcinome épidermoïde, ou épithélioma spinocellulaire, dont la localisation est typiquement labiale inférieure (plus de 95 % des cas), rarement labiale supérieure. La précession d’une lésion épithéliale précancéreuse est très fréquente. D’autres carcinomes sont rencontrés, en particulier salivaires naissant des glandes
salivaires accessoires sous-muqueuses et basocellulaires, plutôt rares dans cette localisation.
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les grands principes thérapeutiques:Selon les stades

 Selon les stades
Pour les tumeurs débutantes T1-T2 N0, selon la localisation, le traitement de choix est la chirurgie fonctionnelle ou la radiothérapie exclusive (curiethérapie, conventionnelle ou IMRT :
radiothérapie par modulation d’intensité). La chirurgie peut être transorale, endoscopique (laser CO2) ou par voie cervical (pharyngectomies et laryngectomies partielles) ; pour la majorité des cas, un curage ganglionnaire sélectif ou radical modifié, uni ou bilatéral est réalisé de principe. Il n’y a pas de place  pour la chimiothérapie. Pour les tumeurs évoluées T3-T4 N > 0, plusieurs options sont possibles, le choix doit être adapté à chaque cas particulier.
La chirurgie, fonctionnelle ou radicale et réparatrice sur la tumeur et les ganglions, sera toujours suivie d’une radiothérapie postopératoire conventionnelle ou associée à la chimiothérapie
si des facteurs de mauvais pronostic sont présents. La radiothérapie exclusive, sur le mode conventionnel, bifractionnée, ou accélérée avec concomitant boost, peut être associée
à la chimiothérapie ou à une thérapie moléculaire ciblée (cétuximab 400 mg/m2 une semaine avant le début de la radiothérapie puis 250 mg/m2 hebdomadaire pendant ladurée de la radiothérapie) [27]. La chimiothérapie concomitante fait appel au cisplatine, au 5-FU, au carboplatine et à la mitomycine C, selon des schémas de mono ou polychimiothérapies. La préservation laryngée fait appel soit à une chimiothérapie d’induction selon le protocole PF ou TPF suivi de radiothérapie conventionnelle en cas de réponse > 50 % ou de laryngectomie
totale, curage bilatéral et radiothérapie complémentaire en cas de réponse < 50 % ; soit à une radiochimiothérapie avec du cisplatine à 100 mg/m2 à J1, J22 et J43 puis une surveillance
simple en cas de réponse complète ou une laryngectomie totale et un curage ganglionnaire en cas de réponse incomplète [4, 10, 17].
Les carcinomes de la cavité buccale sont de façon classique traités et contrôlés par la chirurgie dans 60 à 90 % des cas, la radiothérapie postopératoire étant réservée aux formes infiltrantes
évoluées ou aux cas d’atteinte ganglionnaire multiple. 
Les tumeurs de l’oropharynx sont traitées en première intention soit par radiothérapie, soit par chirurgie suivie de radiothérapie pour les formes plus infiltrantes (en particulier le sillon amygdaloglosse). 
Pour les carcinomes du larynx : les tumeurs limitées peuvent être traitées par la chirurgie fonctionnelle exclusive, mis à part le cas particulier de la corde vocale où la radiothérapie exclusive en champs étroits reste une excellente indication. Pour les tumeurs plus évoluées la laryngectomie totale garde une indication pour les lésions transfixiantes cartilagineuses ou les extensions sous-glottiques avancées ; dans les autres cas, des protocoles de conservation laryngée doivent être proposés.
Pour les carcinomes de l’hypopharynx, les lésions limitées peuvent être traitées par chirurgie partielle suivie de radiothérapie, les formes évoluées relevant de protocoles de préservation laryngée, la chirurgie mutilante (pharyngolaryngectomie totale, pharyngolaryngectomie circulaire) étant plutôt réservée pour le rattrapage des échecs médicaux [4].
Les carcinomes des cavités nasosinusiennes sont traités préférentiellement par l’association chirurgie suivie de radiothérapie externe. Le carcinome peu différencié du cavum est traité par radiothérapie exclusive selon le mode conformationnel ou au mieux par RCMI (radiothérapie conformationnelle avec modulation d’intensité) pour les formes limitées (T1 et T2 N0), tandis
que pour les formes plus évoluées, l’association d’une chimiothérapie
avec la radiothérapie est la règle [28].
Résultats
La localisation, la taille de la tumeur primitive et les métastases ganglionnaires cervicales sont les principaux facteurs qui déterminent la survie des carcinomes épidermoïdes des VADS. L’analyse des taux de survie est rendue difficile par la grande hétérogénéité de ces tumeurs, par l’importance de la lymphophilieet son retentissement dans la survie, par la complexité des traitements mis en oeuvre et la difficulté de mener des essais randomisés prolongés dans le temps. Tous stades et localisations confondus la survie reste en moyenne entre 30 et 40 % à 5 ans [11].
Selon le stade
En ce qui concerne les tumeurs débutantes T1-T2 N0, le contrôle local est de l’ordre de 90 % et la survie à 5 ans de l’ordre de 80 %. Le risque essentiel est l’apparition d’un
second cancer dans les 2 ans.
Pour les tumeurs avancées T3-T4 N > 0, le contrôle locorégional de la maladie est de 40 à 80% selon la localisation let la survie à 5 ans de 20 à 50 %. Le risque de récidive locale est de 40 à 60 % ; celui de métastases à distance de 15 à 30 % ; celui de second cancer de 10 à 15 %.
Selon la localisation 
Pour la cavité buccale, la survie globale moyenne à 5 ans est de l’ordre de 50 % tous stades, sous-localisations (plancher, langue, palais, face interne de joue, etc.) et traitements confondus.
Pour l’oropharynx, la survie à 5 ans varie de 10 à 60 % selon le stade et la sous-localisation (amygdale, vallécules, base de langue, paroi pharyngée postérieure). 
Pour le larynx le taux de survie globale à 5 ans tous stades confondus est de l’ordre de 60 % (80 à 95 % pour les petites tumeurs de la corde vocale, mais aux alentours de 50 % pour
les tumeurs plus avancées).
Pour l’hypopharynx (tous stades et sous-localisations confondus), les résultats globaux en termes de survie restent médiocres, de l’ordre de 15 à 25 % à 5 ans.
La survie à 5 ans des carcinomes épidermoïdes des cavités nasosinusiennes est de 50 à 70 % pour les tumeurs limitées (T1 T2), et de 25 à 30 % pour les formes évoluées (T3 T4). L’association radiochimiothérapie concomitante a montré des taux de survie de plus de 70 % pour des formes avancées des carcinomes nasopharyngés (stades III et IV) [28].
Les cancers de la tête et du cou présentent un risque important de récidive locorégionale lors des 2 premières années qui suivent le traitement initial. Le traitement de ces récidives reste difficile et souvent décevant, particulièrement quand la récidive survient après un traitement chirurgical suivi de radiothérapie postopératoire. La question d’une chirurgie de rattrapage
après radiochimiothérapie devient une éventualité de plus en plus fréquente, mais le pourcentage de patients qui peuvent en bénéficier n’excède pas 50 %, excepté pour les
récidives laryngées. Les résultats en termes de survie se situent alors autour de 15 à 25 % à 5 ans. Par ailleurs, les résultats fonctionnels après chirurgie de rattrapage sont souvent médiocres [29].
Le risque de métastase à distance est de l’ordre de 15 % par an, plus particulièrement encore pour certaines localisations comme l’oropharynx ou l’hypopharynx. 
Conclusion
Concernant les tumeurs limitées, la chirurgie fait appel aux techniques de conservation fonctionnelle, tandis que pour les tumeurs avancées, les pertes de substance sont traitées par
des techniques de reconstruction complexes, notamment par les lambeaux libres.
La radiothérapie conformationnelle apporte un progrès indiscutable dans la prise en charge de ces tumeurs tant sur le plan de l’efficacité que des effets adverses. Pour les tumeurs avancées, la radiochimiothérapie concomitante et la radiothérapie hyperfractionnée (escalade de doses) ont montré une augmentation modérée mais significative des taux de survie et de contrôle locorégional. La radiochimiothérapie postopératoire est indiquée dans les formes de mauvais pronostic chez les sujets âgés de moins de 70 ans. L’association du cisplatine,
du 5-FU et du taxotère est le nouveau standard de la chimiothérapie d’induction pour la préservation laryngée dans les tumeurs avancées (T3-T4). L’association d’une thérapie moléculaire ciblée à la radiothérapie a montré sa supériorité (par rapport à la radiothérapie
exclusive) dans la survie pour les tumeurs avancées. Le traitement des récidives locales dépend des possibilités de rattrapage chirurgical et/ou de la réirradiation dont les indications restent souvent limitées.
L’efficacité de certaines molécules en phase 2 métastatique n’a jamais été confirmée dans les phases 3 où le bras de référence comprenait des sels de platine.
La classification TNM reste le meilleur indicateur pronostique de la survie.
Si les progrès thérapeutiques ont indiscutablement apporté une amélioration en termes de morbidité et de qualité de vie, et si les petites tumeurs gardent un pronostic acceptable, avec un contrôle local dans 80 % des cas, dans les tumeurs avancées le contrôle local est obtenu dans seulement 30 à 60 % des cas et la survie à 5 ans est de 15 à 40 %. Concernant les thérapeutiques classiques de ces tumeurs ORL, les progrès potentiels que l’on peut attendre, notamment en balistique de radiothérapie, en chirurgie réparatrice avec les lambeaux libres, avec de nouvelles drogues cytotoxiques en chimiothérapie, amélioreront très certainement le pronostic de ces tumeurs. C’est l’association de ces thérapies standards qui permettra un meilleur contrôle tumoral. Le développement des essais cliniques coopératifs est un impératif pour tester objectivement ces nouvelles stratégies.
C’est certainement en biologie moléculaire que les progrès sont à attendre en améliorant la connaissance de la signalétique des cellules tumorales, pour mettre en évidence de nouvelles cibles thérapeutiques.
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Stratégie thérapeutique :Traitements associés

Dès l’annonce du diagnostic le patient est inscrit dans un parcours de soins balisé. Les soins de support multidisciplinaires sont coordonnés. Ils contribuent à la prise en charge globale
du malade tout au long de sa maladie. Ils concernent la douleur, l’asthénie, les problèmes nutritionnels, digestifs et odontologiques, les troubles respiratoires, le handicap phonatoire
(laryngectomisés), la réadaptation sociale et l’aide psychologique (souffrance psychique et dénaturation de l’image corporelle). 
L’aide au sevrage de l’alcool et du tabac est réalisée autant que possible. Cette prise en charge continue va jusqu’au stade ultime de l’accompagnement en fin de vie dans les situations palliatives sans possibilité curative.Indications
Le traitement des cancers ORL nécessite un bilan préthérapeutique très précis de l’extension tumorale locorégionale ainsi que du terrain et de la comorbidité associée. Il doit prendre en considération à la fois le site tumoral primitif et les aires ganglionnaires cervicales (métastases) de principe ou de nécessité [3, 10].
Plusieurs techniques peuvent être utilisées, seules ou combinées.
Si la chirurgie et la radiothérapie peuvent à elles seules être curatrices, la chimiothérapie ne peut se concevoir qu’en association néoadjuvante ou synchrone de la radiothérapie unique ou postopératoire. Ces méthodes thérapeutiques multiples, dans leur choix comme dans leurs modalités, la complexité même de ces tumeurs sur le plan anatomofonctionnel, l’évolution locorégionale naturellement monstrueuse, imposent tout naturellement la nécessité d’une réflexion et d’un choix multidisciplinaire, le respect des référentiels classiques (standards, options et recommandations, niveaux de preuves, etc.), l’établissement de thésaurus par unité de concertation, la définition de critères de choix et d’arbres décisionnels adaptés par les équipes traitantes : traitement exclusif par chirurgie ou radiothérapie, choix des traitements combinés (chirurgie ou radiothérapie première), indications des traitements de rattrapagedans les cas encore fréquents de récidive locorégionale.
La concertation multidisciplinaire permet en outre l’inclusion de certains malades dans les essais thérapeutiques en cours.
Elle permet aussi une prise en charge optimale des soins de support (algologie, renutrition par sonde nasogastrique ou gastrostomie, soutien psychologique, etc.). Il existe des facteurs déterminants dans le choix thérapeutique que sont : la localisation et la sous-localisation tumorale, l’aspect macroscopique lésionnel (bourgeonnant ou infiltrant, inflammatoire, bien limité ou non), la taille tumorale, le statut ganglionnaire et la présence de métastases à distance (stade TNM), le contexte carcinologique historique (récidive, seconde localisation, post-radique, etc.), l’âge physiologique et la comorbidité.
Les tendances thérapeutiques actuelles, dans le respect des principes de la carcinologie, sont au développement des stratégies conservatrices, chirurgicales ou non chirurgicales [17].
Dans les centres spécialisés, la recherche clinique a pour but de favoriser les progrès thérapeutiques à partir des résultats des études cliniques et de définir des nouveaux protocoles.
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Stratégie thérapeutique 4-Thérapies ciblées

Les avancées récentes dans la compréhension des mécanismesmoléculaires de l’oncogenèse et particulièrement dans les voies de la signalisation cellulaire ont permis de développer des drogues plus spécifiques qui ciblent sélectivement les cellules cancéreuses.
Dans le cas des cancers ORL, le récepteur membranaire à l’EGF (Epidermal Growth Factor) est souvent surexprimé par les cellules tumorales [21, 22]. Cette surexpression majore le niveau de prolifération tumorale, le risque de récidive métastatique et le risque de radiorésistance. C’est un facteur pronostique indépendant reconnu (mais peu utilisé) ainsi qu’une cible thérapeutiquede choix, soit par l’utilisation d’un anticorps monoclonal (cétuximab),
 soit par l’application d’un inhibiteur spécifique de l’activité tyrosine-kinase intracellulaire du REGF ou récepteur de l’EGF (erlotinib, géfitinib). Des résultats cliniques récents ont montré un effet chimio et radiosensibilisant de drogues ciblant le REGF [23]. Une étude récente multicentrique a démontré la supériorité, en termes de contrôle local et de survie, de l’association d’un anti-REGF (cétuximab) radiothérapie, versus radiothérapie seule,
concernant des tumeurs avancées (stades II et IV) non métastatiques, sans augmentation de la toxicité [24]. La critique principale de cet essai étant un bras de référence non optimal puisque
ne comportant que de la radiothérapie sans chimiothérapie. L’apport des thérapies ciblées combinées à la chimiothérapie pour le traitement des cancers en récidive locorégionale ou en phase métastatique et progressant sous chimiothérapie est encore en évaluation. Deux études récentes de phase II ont montré la faisabilité en termes de tolérance (anémie, réaction acnéiforme, troubles digestifs), sans augmentation de la survie [25-27].
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Stratégie thérapeutique 3-Chimiothérapie

La chimiothérapie a été proposée pour tenter d’améliorer le contrôle local et la survie selon plusieurs modalités [4, 11] : 
en induction, adjuvante ou concomitante à la radiothérapie.Jusqu’à présent, aucun des médicaments utilisés, seuls ou combinés, en induction ou dans un but adjuvant n’a jamais
démontré un bénéfice significatif sur la survie quels que soient e stade et la localisation tumorale [12]. Cependant, la chimiothérapie d’induction a montré un intérêt
dans la préservation laryngée, des cancers avancés du larynx et de l’hypopharynx, avec une bonne corrélation entre la chimiosensibilité et la radiosensibilité, en permettant des taux de larynx préservés non opérés de l’ordre de 40 à 60 % à survie inchangée [12-15]. Les modalités actuelles reposent soit sur l’administration classique de cisplatine à 100 mg/m2 à J1 et de
5-FU à 1 000 mg/m2 de J1 à J5, selon 3 cycles débutant à J1, J22, J43 (protocole PF), soit sur une combinaison de taxotère à 75 mg/m2 à J1, de cisplatine à 75 mg/m2 à J1 et de 5-FU à
750 mg/m2 de J1 à J5, selon 3 ou 4 cycles débutant à J1, J22, J43 (protocole TPF, essais EORTC 24971/TAX 323). L’apport du axotère a permis la diminution des doses de cisplatine et de 5-FU favorisant ainsi la tolérance et l’observance au traitement.
Le protocole TPF suivi de radiothérapie est significativement supérieur au protocole PF suivi de radiothérapie en termes de taux de réponse, de survie sans progression de la maladie et de survie globale (essai GORTEC 2000-01). L’efficacité du protocole TPF en induction a été confirmée avant radiochimiothérapie (avec carboplatine) en termes de survie sans
progression (essai TAX 324). La chimiothérapie d’induction puis concomitante à la radiothérapie améliore le taux de réponse au prix d’une toxicité muqueuse plus élevée de
l’ordre de 20 % [16]. Le protocole TPF s’impose actuellement comme le nouveau standard quand une chimiothérapie d’induction est indiquée.
L’association concomitante de la chimiothérapie cytotoxique et de la radiothérapie permet d’améliorer le contrôle local et de réduire le risque de dissémination métastatique des tumeurs avancées (stades III et IV). Elle est également une alternative possible comme traitement exclusif des tumeurs du pharyngolarynx qui relèvent d’une laryngectomie totale [17].
La radiochiomiothérapie a été évaluée avec une monothérapie (5-FU, hydroxyurée, mitomycine, sels de platine) ou en polychimiothérapie. Actuellement elle peut être considérée comme un traitement standard des tumeurs de stades III et IV non résécables, en sachant que la mucite en est le principal facteur de toxicité limitant [18]. La toxicité tardive est plus fréquente pour les tumeurs du larynx et de l’hypopharynx, et son bénéfice n’a pas été réellement démontré chez les patients âgés de plus de 70 ans.
Deux essais randomisés comparant la radiothérapie et la radiochimiothérapie postopératoire (avec 3 cures de cisplatine) chez des patients atteints d’un cancer des VADS avec au moins 2 facteurs de risques péjoratifs (marges d’exérèse tumorale, adénopathie en rupture capsulaire) ont démontré une amélioration de la survie en faveur de la radiochimiothérapie postopératoire
(EORTC 22981, RTOG 9501) [14, 19]. Des protocoles de réirradiation avec chimiothérapie concomitante pour les récidives locorégionales ont été proposés sans progrès décisifs en termes de survie et au prix d’une toxicité élevée. Le traitement des récidives locorégionales par réirradiation avec chimiothérapie concomitante (5-FU et hydroxyurée) après chirurgie de rattrapage [20] n’a montré qu’un avantage en ce qui concerne la survie sans progression de la maladie et aucune amélioration de la survie globale.
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Stratégie thérapeutique 2-Radiothérapie

La radiothérapie est un traitement dit “locorégional” parce qu’il agit directement sur la zone du cancer et sur sa proche périphérie, notamment sur les premiers ganglions. L’irradiation par voie externe (transcutanée) est le type de radiothérapie le plus utilisé.
Le traitement par radiothérapie implique un compromis entre la nécessité d’irradier suffisamment le tissu cancéreux pour permettre le contrôle local de la tumeur et la volonté d’irradier au minimum les tissus sains voisins afin de limiter la morbidité. Les
progrès technologiques en imagerie médicale, en informatique et en radiothérapie ont permis, depuis une décennie, de développer la radiothérapie conformationnelle, qui se “conforme” au mieux à la géométrie dans l’espace tridimensionnel de la tumeur. La radiothérapie conformationnelle en 3 dimensions (RC3D), en conformant les faisceaux d’irradiation au volume tumoral à traiter, présente théoriquement 2 avantages. D’une part, pour une dose d’irradiation similaire à la radiothérapie conventionnelle, elle diminuerait la morbidité des tissus sains voisins. D’autre part en permettant d’augmenter la dose dans les tissus cibles, elle vise à améliorer le contrôle tumoral local, sans accroître la morbidité induite. On parle alors d’optimisation de l’index thérapeutique (rapport efficacité/toxicité). Cela est d’autant plus important dans les cancers des voies VADS, où les volumes cibles tumoraux sont à proximité de nombreux organes sensibles (que l’on souhaite donc protéger) comme la moelle épinière, la peau et les muqueuses, les pièces osseuses et cartilagineuses, les dents, les glandes salivaires parotides), mais également les globes oculaires, les nerfs
optiques, l’encéphale, etc. Il faut bien se représenter que le ou les volumes-cibles considérés incluent non seulement la tumeur proprement dite, mais également les territoires d’extension éventuels et les aires ganglionnaires de drainage.
L’étape ultérieure est la radiothérapie conformationnelle par modulation d’intensité ou “RCMI”. Par son principe physique, elle permet de modifier volontairement la dose au sein même du champ d’irradiation, en modulant l’intensité en énergie des
faisceaux d’irradiation [8]. Le progrès de cette technique, devenue opérationnelle en France au cours de l’année 2000, réside essentiellement dans sa capacité à épargner les organes à risque et à couvrir de façon plus efficace (plus homogène et
plus précise) les volumes cibles. C’est notamment le cas où les volumes cibles sont de forme concave autour d’organes à risque (tumeur de la paroi pharyngée postérieure enroulée autour de la colonne vertébrale par exemple) et plus particulièrement en cas de nécessité d’irradier de nouveau une tumeur [9]. Cette technique permet également l’escalade de dose avec un meilleur index thérapeutique, avec comme espoir un meilleur contrôle de la maladie et une amélioration
notable de la qualité de vie. En effet, la protection des glandes salivaires peut apporter un confort non négligeable pour les patients, en diminuant voire en évitant l’hyposialie ou encore “xérostomie”, séquelle parfois majeure bien connue des traitements par irradiation sur la sphère ORL.
L’index thérapeutique de la radiothérapie peut également être augmenté par différents moyens comme les modifications du fractionnement, l’utilisation de radiosensibilisants ou de radioprotecteurs ou l’association avec de la chimiothérapie. Les progrès
obtenus (ou attendus) grâce à ces possibilités incitent à s’interroger sur la place actuelle de la radiothérapie conventionnelle dans les cancers des VADS [10].
Le fractionnement peut concerner la dose totale ou le temps total. À partir des modifications de ces paramètres, trois schémas sont possibles : hyperfractionné (augmentation de la dose totale à temps constant), accéléré (diminution du temps total
sans modification de la dose totale) voire très accéléré (diminution du temps total et de la dose totale).
Au cours de la radiothérapie hyperfractionnée, la diminution de la dose/fraction permet d’épargner les tissus sains à renouvellement
tardif concernés par les effets tardifs du traitement (fibrose, nécrose). La dose peut être augmentée jusqu’à 80 Gy. Cette radiothérapie modifiée s’avère supérieure à la radiothérapie conventionnelle en termes de contrôle tumoral local. En revanche,
elle a peu d’impact sur la survie. Cependant la toxicité tardive, qui reste un facteur limitant de l’irradiation, n’est pas
influencée par l’augmentation de la dose totale.La radiothérapie accélérée se justifie par le fait que les cancers
épidermoïdes de la tête et du cou sont des tumeurs à prolifération extrêmement rapide: leur temps de doublement potentiel est de moins de 3 jours. Par ailleurs, par rapport à la radiothérapie conventionnelle, l’allongement de la radiothérapie a
un effet néfaste lié à la probabilité de perte de contrôle tumoral, qui est variable, mais constante. D’où l’idée d’accélérer le traitement pour obtenir de meilleurs résultats. Une hypothèse qui semble confirmée en termes de contrôle local de la
tumeur, mais, là encore, sans effet significatif sur la survie. Enfin, la curiethérapie consiste à délivrer des rayons au plus près de la tumeur par l’intermédiaire de sources radioactives telles que le césium-137, l’iridium-192 ou l’iode-125. Ces sources sont appliquées dans l’organisme au contact des cellules cancéreuses, soit directement, soit scellées dans des “vecteurs”. Cette méthode permet d’irradier la tumeur en protégeant au maximum les organes voisins et dans certains cas d’éviter les traitements chirurgicaux. La curiethérapie s’adresse
au traitement de tumeurs de petit volume, aux contours précis
et facilement accessibles (voile du palais, luette, etc.).
Les effets secondaires observés durant l’irradiation sont essentiellement la radio-épithélite et la radiomucite qui peuvent
nécessiter la mise en place d’une alimentation entérale continue par sonde. Ils sont habituellement réversibles mais leur intensité peut parfois imposer l’arrêt du traitement qui est un facteur pronostique péjoratif pour le contrôle de la maladie et la survie. Les complications chroniques surviennent à partir de la sixième semaine après la fin du traitement ; les plus fréquentes sont la xérostomie et l’induration tégumentaire cervicale.
Les complications dentaires doivent être prévenues par la remise en état avant traitement et par des soins quotidiens (bains de bouche, gouttières fluorées) à vie. La toxicité tardive comme la constriction permanente des maxillaires, la sténose
pharyngée, la nécrose laryngée et la myélite post-radique plus rares sont toujours à redouter. La toxicité actinique peut être majorée par une chimiothérapie concomitante.
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